Wakfu

[Fan-fic] Sombre lune, douce vengeance - Les Carnets Nombre d'abonnés1 abonné

Les contes du vieil Enutrof -> Les histoires au coin du feu
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Nous rentrons tous les cinq à notre village, Korall. Ce village, c'est tout et rien à la fois : toute notre vie, un petit rien par rapport au reste du monde... Pourtant, cela me suffit amplement. L'anarchie des petites bâtisses en bois, aux toits de chaumes, cette vision a quelque chose d'étrangement réconfortant. Au moment où nous passons l'entrée du village, la clameur de la vie de tous les jours nous enveloppe. Le bruit des adultes qui marchent, discutent, plaisantent, les enfants qui jouent à grands cris émerveillés, les chevaux, moutons, et autres animaux, la rumeur du village est autour de nous. Au fur et à mesure que l'on avance, on entend de nouveaux bruits : les rires qui s'échappent de la taverne, le bruit de la scie rabotant le bois chez l'ébéniste, le bruit du marteau frappant l'enclume chez le forgeron... D'ailleurs, en parlant de forgeron, le voici qui sort de son atelier pour accueillir ses fils. Avec, à son habitude, un grand sourire.
- Alors, mes gaillards, vous avez bien profité de votre petite promenade dans les bois? Fini de rigoler, maintenant vous venez bosser ! Allez, on se dépêche !
Ilian et Sona nous font un clin d'oeil, avant de rentrer sagement avec leur père. Il faut dire que ce n'est pas le genre d'homme avec qui on s'embrouille : si les jumeaux sont des forces de la nature, leur père leur rend pourtant une bonne tête... Nous voilà donc tous les trois, Kal, Nawel et moi. Nous continuons d'avancer vers la place du village, en plaisantant sur les jumeaux. Surtout Nawel, qui adore le faire, mais seulement quand ils sont absents. Question de prudence... Nous arrivons ainsi, riant comme des fous, devant l'échoppe du tanneur, Hélom. Kal s'arrête, nous salue gentiment, fait une dernière pitrerie, et rentre dans l'atelier, pour aider son père à préparer je ne sais quelle peau. Mais, vu l'odeur, elle ne doit pas être très fraiche...
Alors que nous repartons avec Nawel, plaisantant sur son sujet favori, le tour de taille des jumeaux, une ombre brune se détache du coin de la maison et me saute au cou.
- Alan ! Eh bien, on part sans avertir sa chérie ? Vilain garçon !
- Ava ! je m'exclame sur un ton faussement exaspéré. Qu'est-ce qu'on avait dit au sujet du vilain garçon ?
- Oh, tu sais, moi et les promesses...
Je soupire, faisant semblant d'être contrarié. Nawel éclate de rire devant mes joues qui ont, bien étrangement, pris une nuance rouge foncé.
- Rattrapé par la garde, mon vieux ! Tu n'échapperas pas à ton destin...
Me tapant virilement l'épaule, et claquant une bise sonore sur la joue d'Ava -il sait bien qu'elle a horreur de ça- il s'enfuit à toutes jambes, tandis qu'Ava hurle de colère, pour de faux. Puis, toute mauvaise humeur envolée, elle m'embrasse fougueusement, sous les rires amusés des passants et l'oeil malicieux de Seth, notre ancien.
- Ho, Alan ! Je suis désolé de t'interrompre en pleine...occupation...mais je crois que ton père a besoin de toi à la ferme. N'oublie pas, c'est l'époque des semailles, faut travailler !
Je lui envoie un sourire éclatant (j'entends successivement benêt, nigaud et niais dans la foule), m'arrache à l'étreinte d'Ava, mais lui garde la main bien serrée dans la mienne. Nous faisons route ensemble, main dans la main, vers la ferme de mon père, un peu à l'écart du village.

Je sens que certains d'entre vous ont besoin (ou envie) de quelques explication sur moi et Ava, alors allons-y. Ava est la fille du cordonnier, on homme solide qui, heureusement pour moi, m'adore. Elle est née, comme par un étrange signe du destin, le même jour que mois, même si je suis du matin et elle du soir. Nawel adore la faire enrager en disant qu'il fallait bien qu'il y ait un paresseux entre nous deux... Elle répond en général qu'il ferait bien de se taire vu qu'elle lui rend une demie-tête. Elle est brune, a la peau mate, tannée par le soleil, des yeux bruns chaleureux, et un sourire à vous rendre fou. Ce qui arrive assez souvent. Fou de joie, bien sûr. Et puis, si je disais le contraire, elle m'arracherait les yeux dans la seconde...
Nous avons toujours été attirés l'un par l'autre. Au début, ce n'était que des regards furtifs, des sourires hésitants, des clins d'oeil rapides, des petits mots gentils... Cela aurait pu durer longtemps si Kal, impatient devant l'éternel, n'avait pas décidé de nous demander si, oui ou non, nous allions finir par nous mettre ensemble. Même si, question subtilité, on touchait le fond, sur le plan pratique, ça a marché.
Si il y en a qui ont envie d'avoir plus de détails, je vous conseille gentiment d'aller voir ailleurs si j'y suis.

Nous arrivons à la ferme de mon père, située sur une colline qui domine le village. Celui-ci m'attend de pied ferme, mais sourit en nous voyant arriver à deux. Il me fait signe qu'il m'attend dans le champ derrière la ferme, si possible rapidement. Je colle un dernier baiser sur les lèvres d'Ava, puis je vais le rejoindre. Je me retourne une dernière fois, pour admirer le spectacle du bourg fourmillant sous le zénith, encadré par les arbres de la forêt de chênes. J'inspire une grande bouffée d'air frais. Je me sens tellement heureux...

Je sais qu'il existe d'autres villages, des villes même, tous bien plus grands et réputés plus beau que mon misérable petit patelin. Mais, ici, c'est chez moi...

Après les semailles, la journée touche à sa fin. Je rentre dans la maison avec mon père, au crépuscule. Je suis acueilli joyeusement par mes cinq frères et soeurs, tandis que ma mère, assise au coin du feu, les réprimande gentiment :
- Laya, Natt ! Laissez donc votre grand frère tranquille, vous ne voyez pas qu'il est fatigué?
Je me contente de sourire. Je prends Natt, le plus jeune d'entre eux - il a cinq ans- sur mes épaules, et attrape Laya, sa jumelle, par la main. Mes deux autres frères, Tito et Piza, nous courent autour en piaillant joyeusement, accompagnés par Kiara, ma petite soeur cadette. J'emmène tout mon équipage dans la grange, où je leur ai aménagé (à l'aide du père d'Ava, que j'avais aidé à porter une de ses commandes) une petite cabane perchée en hauteur, dans un coin. Ils y grimpent en riant, plongeant dans les tas de paille, jouant à attaquer le grand monstre -moi-. Une fois le grand monstre terrassé, nous passons aux batailles de paille. Cela se poursuit jusqu'au dîner, quand ma mère nous appelle. Je fais semblant de m'enfuir en courant, poursuivi par ma petite horde joyeuse. Une fois le dîner passé -une soupe de navets qui, étrangement, n'a pas l'air de les ravir-, j'aide mes parents à les coucher. Puis, après avoir embrassé toute la famille, je vais dans ma chambre m'écrouler sur mon lit. Je m'endors presque aussitôt, le sourire d'une superbe journée accroché au bout des lèvres.

Le lendemain matin, une fois levé, je me rends au village. Pourtant, dès mon entrée, je remarque que quelque chose cloche. La rumeur joyeuse, si présente d'habitude, a disparu, pour laisser place à des chuchotements furtifs. Le vent souffle dans les ruelles, aucun enfant ne joue devant les maisons. Alarmé, je m'avance vers la place du village, où est rassemblé une foule silencieuse. En m'approchant, je remarque un messager du roi, monté sur son cheval. Il est encadré par les villageois les plus influents, dont le père des jumeaux, avec qui il débat avec animosité, désignant de temps à autre un parchemin accroché au panneau en bois réservé aux édits royaux. Soudain, il s'exclame, agacé :
- Cela ne plaît pas plus qu'à vous, mais vous n'aurez pas le choix ! Laissez moi partir, maintenant !
Il fait manoeuvrer son cheval dans la marée humaine, s'en extrait et détale au grand galop. La rumeur de commentaires inquiets envahit la place. Je me dirige vers le panneau de bois, pour comprendre cette agitation, et en me disant que le roi avait encore dû lever un impôt supplémentaire. Heureusement, je sais lire, mon père ayant jugé que cela pût m'être utile. Je m'approchai de l'affiche, me faufilant entre les villageois. Une fois arrivé devant l'affiche, je compris tout de suite que ce n'était pas un énième impôt, comme je l'avais supposé.

C'était bien pire.

Une déclaration de guerre...
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Créé le 27/11/12 é 07:55
Derniére modification le 28/12/12 é 07:47
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